D’Athénaïs, nul ne peut contester la réussite professionnelle ; c’est une femme puissante. Sa position en hauteur est méritée. Elle exerce des fonctions d’autorité dans ce monde d’homme et elle a su faire sa place à force de talent, de volonté, et de résolution, dans le monde des influents.  En quelques bons souples et puissants. Elle sait ce qu’elle veut, et cela suffit à faire la valeur de sa notoriété. Elle dirige son organisation avec un jugement ferme, et une réelle vision des choses. Son autorité s’étend sur des services et des unités innombrables ; partout, des hommes et des femmes travaillent avec ferveur sous sa seule référence. « Athénaïs souhaite » …  « Athénaïs a décidé » … « Athénaïs envisage » et aussi, « une fois de plus, Athénaïs a eu raison de faire, de refuser, d’engager » … On loue sa pertinence, et sa décision. On entre dans son vaste bureau du dernier étage, avec de l’appréhension, mais aussi un frisson d’adoration.

Athénaïs est bien entourée, elle a ses fidèles qu’elle sait choisir et gratifier. Elle a sa cour et ses courtisans – souvent jeunes, car elle redoute le miroir de l’âge ; elle donne les titres et les honneurs ; un mot, d’humour choisi, qui volera vite dans les couloirs, un coup de patte, et tombe la disgrâce. Elle décide la création d’une nouvelle unité, avec tous ses moyens et son équipe, ce sera pour nommer à sa direction celui-là qui a la principale qualité d’être son amant. Femme, elle affirme aider les femmes à gravir les échelons, et fait tout pour leur offrir de la visibilité et de la responsabilité. Du moins, tant que leur apparence, ou leur jeunesse, ou leur intelligence ne risque pas de voiler les siennes. Elle commence souvent son propos par « nous autres, femmes » … « En tant que femme » … « Les femmes comprendront ce que je veux dire » … Mais, sitôt que vous serez en confiance, ne lui parlez pas d’Angélique, de Zélie, de Climène, qui ont réussi ici, ou brillé hier, surmonté cela ; Athénaïs vous mordra, et l’organe blessé mettra longtemps à s’apaiser. Elle vend combien elle est adepte d’un management participatif, et déclame à qui veut, sa passion du collectif dans le travail ; mais ses fidèles savent qu’à aucun prix, il n’est permis de la contredire, ou de porter une contribution critique à ce qu’elle a dit. Elle répète qu’une entreprise, une équipe, une mission, tout cela est précieux comme une famille et voilà tout ce qui en fait l’émerveillement durable; mais un jour, elle est nommée là-bas, un peu plus haut qu’ici, et la voilà en allée, sans retour, elle s’efface dans le paysage, sans prendre le temps de dire adieu, captivée absolument par sa nouvelle ambition.

C’est dommage de devoir relever, alors que les femmes ont mis des siècles à pouvoir enfin ouvrir leur talent au profit du genre humain, combien certaines, sitôt qu’elles gravissent une marche, ne réussissent pour y rester qu’à oublier qu’elles sont femmes et voler aux hommes les plus détestables de leurs travers.

 

 

 

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