Lettre d’information N°3. Janvier 2022.

 

“Les années nous viennent sans bruit.” Ovide. Les Fastes. VI, 771).

Déjà 2022…Et voici encore une année qui s’envole…Mais où vont-elles toutes comme cela?  D’où viennent-elles?

Des souhaits et des vœux. Bien sûr, c’est le nouvel an ! Que souhaiter en cette année balbutiante, qui semble déjà lassée avant que d’avoir commencé ? Après tout, une bonne année, certes, mais pour quoi faire ? Se stresser en comptant les variants qu’égrène malignement notre virus familier ? Non. Contempler les phases savantes que la Terre démontre dans sa riposte climatique désormais quotidienne contre notreespèce ? Non plus. Se rappeler en marchant dans la rue, qu’un français croisé sur trois est désormais d’extrême droite ? Non, encore non. Allons donc… Il y a mieux à vivre que nos peurs.

Souhaitons-nous des choses durables. Souhaitons-nous de belles patiences, de longs silences. D’attendre un peu moins du genre humain dans sa masse (il nous décevra encore, mais nous amusera toujours, vous verrez…) ; et un peu plus de soi-même, de ceux qu’on aime et qui restent tout près. Ce qui sera déjà pas mal.  Savourer la brièveté des belles choses, et l’éternité de leur souvenir,  et contempler les effets de lumière sur nos paysages extérieurs et intérieurs. Allons, profiter des belles choses que nous offre le monde. Le ciel sait qu’il y en a, suffit de les chercher.

Souhaitons-nous des miracles. Souhaitons plus encore.

Alors, de jolies choses pour commencer l’année avec une sensation de bonheur.  Je vous suggèrerai- à propos de lumières – quelques lectures, qui ne figureront pas dans les chroniques de nos « Cahiers ».

Tout d’abord, le magnifique « Vous avez connu Rimbaud ? » de Jean Rouaud, illustré par Rachid Maraï ; on est proche du roman graphique, mais avec Rimbaud, tout est déjà roman, tout est déjà graphique. (Ed. Dunod/Graphic). Vous serez transporté avec magie dans cette étrange lueur que laisse partout le sillage de notre plus grand et mystérieux poète : la famille, les proches, ceux qui affirment en être, ceux dans l’ombre du géant, et qui l’ont vu passer en toute hâte. Vous aurez la sensation d’être un invité de cette communauté lointaine, attablé ou en chemin avec eux, et vous refermerez le livre comme un familier.

Une très belle édition bilingue de Dante dans la Pléiade, la « Comédie » ; je ne parle pas le florentin du XIII è siècle, comme tout le monde d’ailleurs, et pourtant, et pourtant, ça vaut la peine. Quelle langue, quel vertige ! Entamé la(re)lecture du « Purgatoire ». Spectacle désolant des châtiments divins, peu de différence dans le sadisme, avec « l’Enfer » rendu plus célèbre par les romantiques. Comme cette religion est cruelle !  Quel effort exigé dans la lecture, quelle attention aussi! On ne va pas se le cacher, la lecture de Dante n’est pas une bluette. C’est le poète absolu de la densité (pour chaque Chant, l’édition vous produit dix pages de notes en fin de volume, profitons-en pour devenir moins ignares). Très riche commentaire de Borgès traduit dans ce volume, en prime.

On pourra aussi profiter en ce début d’année d’un peu de poésie. Très élégant, très pertinent « Petit éloge de la poésie » de Jean-Pierre Siméon (Ed. Folio Gallimard); c’est léger et aérien, c’est malin. Et sur un mode plus grave, « Je ne peux y croire », fascinant volume d’anthologie de haïkus «atomiques» : laissons-nous éblouir de l’incroyable résilience de l’esprit japonais face au triple drame nucléaire d’Hiroshima, Nagasaki, et Fukushima, et son cortège d’horreur – résilience et ré-émergence de l’humain, par la poésie (Anthologie établie par Dominique Chapot, Ed. Bruno Doucey). Tenez, prenez ça :

Libellules au ciel
Les enfants dans ma tête
Qui ne vieilliront jamais

(Matsuo Asuyuki)

 

Ou encore :

Cosmos en fleurs
Débris de tsunami…
Rien ne change

(Manabe Ikuko)

 

Éblouissement encore. Allez-vous promener du côté de l’Hôtel de la Marine (Place de la Concorde), et, émergente comme d’un temps retrouvé, la collection Al Tani vous ravira des merveilles des civilisations, de tous les continents, et nous rappeler ces beautés que parfois, savent nous donner les hommes.

 

Mais nos « Cahiers d’Alceste » que vont-ils donner encore en 2022 ? Je ne suis pas sûr d’en avoir aujourd’hui LA réponse.

Les « Caractères » vont s’enrichir, et l’effondrement des formes élémentaires de lucidité autour de nous pousse à scruter encore et encore nos contemporains dans leurs travers.  C’est sans fin, cette affaire…On vous parlera de haricots, de tristes parleurs et de somnambules. D’autres facettes, aussi.

Toujours le Conotron, et bien des poèmes en approche…

Dans cette obsession de capter l’air du temps et d’en conserver un souvenir, une simple vibration, un nouveau chapitre sera ouvert. Des évanescences…

Les Cahiers d’Alceste, c’est par ici et ci-dessous…

www.lescahiersdalceste.fr

Bien à vous, mettez le bon pied en avant pour entamer 2022 (déjà !) et gardez confiance dans le genre humain. La littérature amateure est son viatique.

Et n’oubliez pas, O lecteurs: vos commentaires (bienveillants) et vos retours (encourageants) c’est ICI : hervehulin@orange.fr

Très belle année, pleine de littérature (amateure ou pas) à vous.