I

Des lilas en été la senteur triomphante
Ravive dans l’allée le gris des oliviers
Par amour du vieux mur leur voilure a défié
Les transports du mistral et sa vague tourmente.

Le temps semble attentif à l’ennui des pétales
Infusant la feuillée.  Mais au creux des alcôves
De la treille, un ancien trouble soudain s’exhale ;
Les lilas s’endorment dans l’été qui se sauve.

II

Les lilas évanouis ne renonceront pas
À l’éclat du calcaire où leur fleuve s’exile ;
Et tous les silences proclament ici-bas
De l’automne enfin né la lumière fragile.

L’azur s’en est allé. Les feuilles ont fléchi.
Chaque ligne est gagnée d’une rousseur funeste.
Maintenant que plus rien de l’écume ne reste,
Les lilas soupirent et rêvent de midi.

III

Les lilas s’inclinent au seuil d’une prière ;
La Terre est alentie, l’hiver paraît immense.
La neige en se posant fait taire une rivière.
L’espoir leur reviendra et sa frêle radiance.

Rien ne fait négliger le vain travail de vivre.
Caressés d’un reflet qui les fleurit encore,
Comme l’hirondelle qu’il faut déjà poursuivre,
Les lilas s’effacent dans le vent incolore.

IV

Les lilas au printemps ont un effet de brume
Repeuplant le vieux mur de mauve et de verdure.
Blottie sous la treille, l’ondée secoue ses plumes
Et de la joie lointaine un doux regret perdure…

Si ne restent du jour que ses tristes reliques,
Que la peine et la joie s’épousent, peu importe…
Car tandis que s’oublie l’ombre des feuilles mortes,
Les lilas sous le mur restent mélancoliques.

    V

Les lilas effacés seront toujours tragiques.

 

©hervehulin